Context: This series of visuals was published on social media to reach a wider audience.
✶ Here are other possible email examples. Below, you will find other ways to proceed as well as documentation that reveals the status of the rabbits (・ x ・) ➜
1/ As someone deeply concerned about the welfare of the rabbits on Ōkunoshima Island, I am writing to request concrete measures to improve their well-being. It is essential to ensure regular veterinary care, access to clean drinking water, and appropriate food to maintain their health. I also suggest collaborating with animal protection organizations to implement a comprehensive program of care and disease prevention. Additionally, creating protected areas or shelters could be considered to provide the rabbits with a safe and suitable environment.
Thank you for your attention to this request and for future actions in favor of these animals.
2/ I understand that the situation with the rabbits on Ōkunoshima Island is complex due to the large number of animals, but this should not prevent the implementation of measures to ensure their welfare. Every rabbit deserves to live in proper conditions, to have access to adequate food, regular veterinary care, and shelter when needed. They deserve to be happy and healthy, and I hope concrete actions will be taken to meet their specific needs and provide sustainable protection.
Thank you for your attention to this urgent matter.
3/ Upon learning about the situation of the rabbits on Ōkunoshima Island, I am particularly concerned about their well-being. I hope sustainable solutions will be implemented to ensure their protection, including the introduction of veterinarians on-site and measures aimed at improving their quality of life while preserving the island’s balance.
4/ I would like to express my support for the protection of the rabbits on Ōkunoshima Island. It is crucial to establish sustainable solutions for their well-being, such as introducing permanent veterinarians and a system to safely provide drinking water. The implementation of specialized services to manage these needs is vital to ensure their survival and long-term health.
5/ I recently discovered the situation of the rabbits on Ōkunoshima Island through social media, and I was deeply moved. While the island is unique, the commercial exploitation of the rabbits leads to many issues for both the animals and the environment. I believe a more ethical approach would be to transform the site into a nature reserve dedicated to wildlife and plant conservation. This place could become a model for conservation, offering naturalist and historical tours while respecting the integrity of the ecosystem and the welfare of the rabbits.
Thank you for your attention, and I hope this suggestion will be considered in the best interest of the local wildlife.
↪ [ENG] Here are the possible actions to take as of today to make a change / [FR] Voici les moyens d’actions possibles à ce jour afin d’agir :
🕊️ Share the information with those around you, including potential tourists planning to visit Japan soon (but not only).
✉️ Contact the Ministry of the Environment of the Japanese Government : Ministry of the Environment, via social media Twitter (@MOEJ_Climate) and LinkedIn or by mail : moe@env.go.jp
✉️ Contact the company Kyukamura via their contact form or on instagram (@kyukamurahotels)
❔I would have suggested writing to the official Rabbit Island website, but the contact form no longer exists… -> Rabbit Island
🤍 Support the Dōkunoshima Rabbit Medical Fund by highlighting their account and content co-created by @junkohiking and @her.name.is.mercedes (Instagram pseudonyms) to address the situation.
☝‼︎ [ENG] Please note that expressing your concern about the situation in your native language will demonstrate that this issue raises international questions, and that potential customers could be lost. / [FR] Il est important de noter que formuler vos préoccupations concernant la situation dans votre langue d’origine mettra en évidence l’ampleur internationale de cette problématique, et pourrait faire perdre des clients potentiels.
[ENG] If I receive new proposals or information, the list will be updated. / [FR] Si je reçois de nouvelles propositions ou informations, la liste sera mise à jour.
↪ [ENG]Testimonies on the state of the rabbits on Ōkunoshima / [FR] Témoignages sur l’état des lapins à Ōkunoshima :
Ōkunoshima ou l’île de la dépendance par Neptori (Hmm, oui, désolée, il semble que je sois l’une des seules à avoir fait ce travail de recherche en français !? / Hmm, yes, sorry, it seems I’m one of the few who has done this research work in French !?)[FR]
If you have any additional information, updates, or would like to write to me about this, you can email me at : neptori@protonmail.com
Tourisme et sentientisme : le kawaii vivant au service du profit
Le terme kawaii (可愛い en japonais) signifie littéralement « mignon » ou « adorable ». Il est utilisé pour décrire des choses, des personnes ou des comportements qui évoquent une sensation de douceur, d’innocence ou d’attrait attendrissant. Il s’agit désormais d’une esthétique et d’une tendance culturelle dominante.
Temps de lecture estimé : 49 minutes
Is a full English version of this article available? The entire content of this article is written in French; however, many sources are in English. You can certainly use a high-quality translator like DeepL, or use Google’s automatic translation tool, to access this content ☆
「 Perspective de l’article 」
À l’origine, mon message suivait une trajectoire très simple : “Regardez, Ōkunoshima, c’est ça aussi. Réfléchissons-y.” Illustré, mon propos s’appuyait sur l’histoire de Lamp-chan, accompagnée de courts conseils écrits. Après réflexion, j’ai jugé intéressant d’offrir une approche plus condensée sur le sujet, tout en approfondissant les enjeux du tourisme animalier et l’importance de reconnaître les animaux comme acteurs sociaux.
Nous allons aborder ces lapins comme des êtres analysés sous un prisme légèrement biologique, davantage économique, mais surtout comme ayant de forts impacts sur les pratiques sociales humaines. Nous verrons également, en retour, comment nos dynamiques construisent des relations inter-espèces potentielles, oscillant entre dépendance et domination humaine. Je tenterai d’approfondir, du mieux que je le peux avec mes connaissances actuelles, les enjeux éthiques de la cohabitation entre les espèces sur Ōkunoshima. Pour rappel, je n’ai pas encore la chance de bénéficier d’un tutorat ou de retours de la part de mes pairs, étant une modeste humaine de classe populaire qui cherche à reprendre officiellement ses études. :>
Ce texte se situe dans une zone hybride entre plusieurs genres, mêlant enquête personnelle et critique, essai et réflexion académique, tout en s’éloignant du formalisme strict. Nous explorerons l’éthos des lagomorphes, au sens anthropologique et sociologique, qui englobe leur mode de vie, leurs comportements sociaux, et leur relation à l’espace et aux visiteurs. L’éthos correspond à l’ensemble des caractéristiques et des valeurs qui définissent la manière d’être et d’agir d’un groupe ou d’une communauté. Cela inclut des éléments comme les croyances, les traditions et les normes sociales, qui influencent profondément les comportements individuels au sein de cette communauté.
Nous analyserons l’organisation spatiale, les relations sociales, et la transmission culturelle, ainsi que les interactions spécifiques que la sédentarité génère dans un écosystème local. Cependant, cet écrit comportera inévitablement des angles morts, dus à un manque de connaissances sur le sujet ou à des erreurs d’inattention de ma part, dans un contexte de maladie.
Spécisme ? « Le spécisme, calqué sur l’anglais speciesism et construit sur le modèle du terme racism (racisme), a été inventé par Richard Ryder et popularisé par Peter Singer dans les années 1970. Il désigne une discrimination fondée sur l’espèce, où l’espèce en soi détermine la manière dont un être peut être traité. En pratique, le spécisme justifie et impose l’exploitation et l’utilisation des animaux par les humains, de façons qui ne seraient pas acceptées si les victimes étaient humaines. » (définition venant du site wiktionary et cahiers-antispecistes.org)
Ōkunoshimaou Usagi Shima (うさぎ島, « Rabbit Island »)
« Shima » signifie « île » en japonais.
S’il y a une île sur laquelle j’ai longtemps rêvé de poser les pieds, c’est celle d’Ōkunoshima. Imaginez : vous avez la possibilité de nourrir des dizaines, voire des vingtaines de lapins, vivant sur une île chargée d’histoire. Située au centre de la mer intérieure de Seto, dans le sud de la préfecture d’Hiroshima, l’île a été construite en 1902 et est rattachée à la ville de Takehara. Bien que l’endroit soit placée sous la juridiction du Ministère de l’Environnent, les installations et le nettoyage sont gérés à la fondation KYŪKAMURA. Autrefois, l’île avait pour objectif de protéger les ports militaires de Kure et d’Hiroshima. Encore aujourd’hui, des canons placés dans les zones méridionales et centrales de l’île restent visibles.
Pour vous y rendre, vous devrez prendre le ferry ou un bateau à grande vitesse depuis le port de la ville de Tadanoumi. Des départs ont lieu toutes les heures en journée, et la traversée dure un quart d’heure. Vous pouvez séjourner dans un hôtel (qui dispose d’une station d’eau) ou choisir l’espace de camping, puis déambuler sur plusieurs kilomètres ou faire du vélo. Il est possible d’acheter de petits sacs de granulés au guichet des billets du ferry, bien que leur vente soit désormais restreinte. Très populaire sur Internet, notamment sur TikTok ou Instagram, cette destination touristique semble, au premier abord, aussi insolite que paradisiaque. La promotion publicitaire des séjours met systématiquement en avant les adorables figures de petits lapins, devenues indissociables de la motivation et de l’arrivée des futurs touristes. Un tourisme qui alimente son propre piège, son propre fléau. Les lapins, eux, n’ont pourtant pas à payer le prix de leur surpopulation. Mais avant de nous pencher sur cette problématique, étudions l’histoire de l’île.
Ⅰ- Une île d’expérimentation néfastes à des humains et des lapins
Durant la Seconde Guerre mondiale, l’île servait de base militaire secrète pour la production de gaz toxiques. L’idée était alors de pouvoir s’en servir contre la Chine. Encore aujourd’hui, les vestiges de cette période de l’Histoire sont encore visibles. Cette situation singulière confère à cet endroit insolite une attention particulière, exploitée à des fins lucratives.
On évoque souvent l’utilisation de cette île pendant la Seconde Guerre mondiale, mais il est important de rappeler que la première installation moderne vient du ministère des Télécommunications : le phare d’Ōkunoshima. Le détroit entre Shikoku et Ōshima constituant une route maritime difficile, l’île fut choisie pour son isolement et sa discrétion en 1925, lorsque l’Institut de science et techniques de l’armée impériale japonaise lança un programme secret de développement de munitions chimiques. Avant cette période, l’île abritait sept maisons privées ainsi qu’une dizaine de résidents, principalement des agriculteurs, qui furent expulsés de force. L’endroit était idéal : éloigné de Tokyo en cas d’accident, il ne restait plus qu’à transformer l’usine de conditionnement de poisson en unité de production de gaz toxiques. La construction s’étala de 1927 à 1929. Suivant les recherches menées aux États-Unis et en Europe pour développer des armes chimiques, le Japon, bien que signataire de la convention de Genève en 1925 bannissant l’usage de la guerre chimique, poursuivit ce projet. Certes, ni le développement ni le stockage de ces armes n’étaient explicitement interdits, mais cette partie de l’Histoire fut dissimulée jusqu’à effacer toute trace de l’île sur certaines cartes.
Mais soyons d’autant plus précis : l’île était déjà rayée bien avant le début de la période Showa (1926-1989). C’était le cas dès les périodes Meiji (1868-1912) et Taishō (1912-1926) précédentes. La demande provenait du commandement de la forteresse de Geyo, qui servait de poste d’observation. La forteresse était équipée pour surveiller et défendre l’île contre d’éventuelles attaques navales ou aériennes. Les cartes indiquaient alors en rouge la zone, afin de protéger l’endroit.
À cette époque, les riverains et les employés n’avaient même pas été informés de ce changement radical. Pourtant, l’exposition à autant de produits toxiques allait faire souffrir de nombreuses personnes, qui travaillaient dans des conditions pénibles et difficiles. Quatre types de gaz toxiques ont été produits sur place : des agents sanguins, lacrymogènes, érosifs et émétiques.
À la fin de la guerre, les documents contenant les informations relatives à l’usine ont supposément été brûlés. C’est l’armée australienne qui a été chargée de son assainissement. Les forces alliées ont également fait disparaître les gaz par différents moyens : en les brûlant, en les relâchant dans l’air, en les enfouissant dans le sol ou en les immergeant dans la mer. Le silence a évidemment été maintenu autour de cette affaire. Le gaz moutarde, également connu sous le nom d’ypérite, est pourtant une substance cancérigène. Plus de six kilotonnes, ainsi que des gaz lacrymogènes, y ont été produites au sein de l’atelier d’armes chimiques, entraînant la mort de nombreux ouvriers, victimes de cancers généralisés ou de troubles respiratoires. Le statut de victime a été très difficile à obtenir à l’échelle du département afin de bénéficier de soins, bien que le nom de Hiroshima (suite aux bombardements atomiques des États-Unis sur le Japon en août 1945) ait toujours été associé à la souffrance liée aux armes de destruction massive. Plusieurs décennies plus tard, certaines victimes survivantes ont reçu des aides de la part du gouvernement pour un traitement médical. Durant la guerre, des lapins ont également été utilisés dans l’usine pour tester l’efficacité des armes chimiques. Mais, à priori, les lapins ont été euthanasiés ou tués lors de la démolition de l’usine. Il n’y aurait donc aucun lien de parenté avec les lagomorphes qui gambadent actuellement sur l’île. Bien plus tard, lors de la guerre de Corée, l’armée américaine s’empara de l’île et de ses infrastructures afin d’y déposer des munitions, de 1950 à 1955. Aujourd’hui, Ōkunoshima ne compte plus que, peut-être, les employés du service de tourisme qui vivent en permanence sur place.
Le musée des gaz toxiques fut ouvert en 1988, et encore aujourd’hui, certaines parties de l’usine sont scellées en raison des risques de contamination qu’elles représentent. Toujours est-il que l’île accède à son statut de témoin historique avec une volonté touristique.
Akarinomoribito est un personnage créé pour représenter le phare de l’île d’Ōkunoshima. Il incarne par cet anthropomorphisme un symbole protecteur et paisible, guidant par sa lumière les voyageurs. Sa création date de 2022 et s’inscrit dans la tradition japonaise des yurukyara (= mascottes locales) utilisées pour représenter des lieux ou des institutions afin d’attirer des visiteurs.
Ⅱ- De l’usine fantôme sur les cartes au terrain de golf
Nous sommes en 1961 et Ōkunoshima devient un village de vacances national. Sous demande de la préfecture, une enquête sur les potentiels gaz toxiques encore présents sur place est menée. Les forces d’autodéfense y trouveront 2,5 tonnes dans des abris antiaériens. En 1972, de nouvelles victimes sont recensées alors que la construction de l’extension du village est en cours. Le sol était toujours toxique. Une étude menée par l’Agence pour l’environnement révélait en 1995-1996 que la contamination du sol par l’arsenic s’élevait toujours bien au-delà des normes environnementales. La fin de l’assainissement du sol fut achevée en 1997, et les médias déclaraient en 2009 que l’arsenic n’était plus détectable, ni dans le sol, ni dans la mer. Voilà les raisons pour lesquelles l’eau potable n’est pas disponible à Ōkunoshima. Depuis 2004, elle est importée par bateau régulièrement. Une conduite d’eau sous-marine avait pourtant été envisagée, mais une étude révéla la présence d’armes, encore et toujours.
Plage de baignade, piscine, parcours historique, golf, navettes, sources thermales (dont des contrôles de la qualité de l’eau sont effectués tous les 5 ans), terrains de tennis et petits lapins : ça y est, l’île est prête à accueillir un public. En fait, lorsque l’île a été désignée pour devenir un village de vacances national, il fallut choisir une mascotte : un singe ? Un cerf, peut-être ? Le lapin fut choisi, vous vous en doutez bien.
Avant le boom de popularité, le taux d’utilisation des logements du village de vacances était inférieur à 50 %. En 2011, les médias japonais mettent l’endroit sous les projecteurs à l’occasion de l’année du lapin dans le zodiaque chinois. Une agence de voyage organise la même année un programme de voyage autour de la figure de l’animal pour les touristes nationaux et internationaux. Puis, en 2013, et depuis, Internet a façonné notre reconnaissance de l’île. Le nombre de visiteurs annuels a lui aussi considérablement augmenté. En 2010, on en comptait environ 152 000, contre 360 000 visiteurs en 2017 ! Pour les nationalités étrangères, on comptait environ 378 personnes en 2013 et 17 215 en 2015.
L’île aux lapins connaît son lot de problèmes : un sujet encore tabou, alors que le tourisme continue de prospérer au Japon dès qu’il existe la possibilité d’établir une semblance de connexion interespèce (cafés à animaux, village des renards…). Si Usagi Shima est devenue une attraction populaire, il est crucial de se demander dans quelle mesure ce tourisme est responsable.
Ⅲ- Qui sont les lapins d’Ōkunoshima?
Une théorie évoque que des élèves d’une école primaire locale auraient relâché huit lapins dans la nature en 1971. Une rumeur circule raconte aussi que certains lapins de l’île, surpeuplés temporairement, auraient été déplacés (voire abandonnés) par des personnes liées à l’île vers la ville voisine de Rabbit Island. D’autres racontes que des touristes indélicats auraient laissé des lapins à plusieurs reprises, entraînant ainsi une population de lagomorphes toujours plus diversifiée. Cependant, bien avant cela, des lapins avaient déjà vécu — et surtout souffert — sur ce territoire. Retour en arrière pour mieux comprendre l’histoire de ces animaux sur l’île :
D’après le centre des visiteurs d’Ōkunoshima, le nombre de lapins s’élevait à 300 en 2007. Ce chiffre a continué de croître, atteignant environ 700 individus en 2013, puis 900 en 2018. Ce développement rapide témoigne de l’adaptabilité de ces lapins, qui prospèrent sur un territoire relativement restreint. En effet, l’île aux lapins tient bien son nom en raison de la population d’animaux qui y réside en si grand nombre, compte tenu de sa petite taille. Pour vous donner une idée des dimensions de ce parc national, sa longueur totale est d’environ 1,5 kilomètres pour 70 hectares. L’altitude maximale de l’île atteint 108 mètres sur le côté nord, et sa circonférence est de 4,3 kilomètres, ce qui fait d’Ōkunoshima un lieu relativement compact mais riche en histoire.
Loin d’être des lapins sauvages, ceux d’Ōkunoshima sont en réalité des lapins domestiques qui auraient été relâchés en 1929, après avoir été utilisés dans des expérimentations chimiques sur l’île. Ces lapins européens (Oryctolagus cuniculus), considérés comme une espèce invasive au Japon, ont servi à tester l’efficacité de gaz toxiques. L’hypothèse la plus répandue est qu’ils auraient été relâchés à la fin des essais. Cependant, d’autres rumeurs évoquent l’histoire des écoliers qui les auraient également relâchés.
Un tel nombre de lapins, dans un pays comme le Japon, n’est pas anodin. En effet, il ne s’agit pas d’une espèce native, et la loi sur la protection de la faune ne reconnaît pas cette espèce comme résidente. Cela soulève des questions importantes sur la responsabilité à avoir vis-à-vis de ces animaux, dans un contexte si particulier et fait naître des divergences d’opinions.
⭢ Il est important de ne pas oublier les nombreuses autres espèces qui résident en permanence sur l’île. Parmi les oiseaux observés, on trouve le corbeau à gros bec (le seul prédateur potentiel des lapins), la tourterelle orientale, le bulbul à oreillons bruns, l’hirondelle de Bonaparte, le monticole bleu, le zostérops du Japon, la mésange d’Asie, la bergeronnette du Japon, le milan noir, etc. Du côté des insectes, il m’a été difficile de trouver une base de données exhaustives recensant toutes les espèces observables, mais note la présence de lucanes (Dynastes hercules). Le sanglier du Japon (Sus scrofa leucomystax), couramment appelé « inoshishi » (猪/イノシシ) fait également partie intégrante de la faune locale.
Les poissons ne sont pas non plus exempts de souffrance, car il est possible de pratiquer la pêche à la ligne au bord de l’eau. La vie sous-marine abrite des dorades rouges, des jeunes alevins, ainsi que d’autres espèces dont je ne connais pas forcément le nom en français. Voici leurs équivalents en anglais : bambooleaf wrasse, marbled rockfish, et plusieurs autres membres de la grande famille des labridés.
Un énième paradoxe de nos loisirs spécistes : il faut protéger les lapins, les chérir et leur offrir du bien-être, tout en acceptant la mort ou la blessure de nombreux autres individus, si l’on se prête à une partie de pêche. Pourtant, comme le soulignait C. Brown en 2015 : « Les nombreuses preuves de la complexité comportementale et cognitive du poisson, ainsi que de sa perception de la douleur, suggèrent qu’il serait souhaitable d’accorder aux poissons le même niveau de protection que n’importe quel autre vertébré. » Un sujet encore délicat, où notre solidarité envers les poissons reste souvent amoindrie en comparaison de celle que l’on accorde aux vertébrés terrestres. Nous ne les voyons pas, ne les côtoyons pas, percevons plus difficilement leurs émotions et leurs besoins. Mais il me semblait important de souligner leur existence — et leur souffrance.
➜ Cliquez sur chaque images pour lire la situation de l’île aux lapins :
Pour les personnes handicapées ayant des difficultés à lire le texte de ma bande-dessinée, j’ai publié le script Cliquez ici pour y accéder directement. Vous y trouverez également la version en anglais. [ENG] For individuals with disabilities who have difficulty reading the text of my comic, I have exported the text to a page. Click here to access it directly.
Ⅳ- L’alimentation, vecteur du lien entre les humains et les lapins
⭢En février 2024, trois auteurs, Rie Usui, Takahiro Kubo et Thomas Jones, publiaient un article intitulé Travelling to Feed Animals: Identifying Motivations of Tourists on ‘Rabbit Island,’ Japan. Cette publication présente les résultats d’une étude approfondie sur les motivations et les perceptions des touristes concernant l’île aux lapins.
L’article commence par rappeler que le nourrissage d’animaux sauvages est un comportement courant à travers le monde, mais qu’il a souvent des impacts négatifs sur les animaux nourris. À partir de leur enquête, les auteurs identifient quatre principales motivations des visiteurs :
Se rapprocher des lapins.
Trouver les lapins mignons.
Rendre les lapins heureux.
Observer les lapins manger.
Pour parvenir à ces conclusions, une enquête en ligne semi-structurée a été réalisée via Google Forms entre décembre 2021 et mars 2022. Ce type d’approche est qualifié d’étude de cas unique, car elle vise à analyser un phénomène spécifique tout en explorant de nouvelles connexions théoriques ou en remettant en question les modèles établis dans la littérature scientifique.
Pour recueillir les données, un code QR, renvoyant au formulaire en ligne, était mis à disposition des visiteurs sur place. Ces journées de collecte sur l’île permettaient non seulement d’encourager les réponses, mais aussi d’observer directement les interactions entre les touristes et les lapins. L’enquête était proposée en japonais et en anglais pour toucher un large public. Au total, 138 individus ont participé à l’étude.
Les résultats révèlent que les motivations liées au nourrissage des lapins sont principalement centrées sur le plaisir personnel, mais également qu’elles répondent à une forme d’instrumentalisation de l’animal. Nourrir un lapin devient un moyen d’augmenter les chances d’obtenir une interaction, de provoquer une réaction de l’animal, et de créer une proximité éphémère, le temps du séjour à Ōkunoshima.
Ces résultats s’alignent d’ailleurs avec une autre étude menée par Rie Usui, qui souligne que l’île d’Ōkunoshima est majoritairement perçue comme un lieu de divertissement. Elle note également que le nourrissage constitue l’une des expériences centrales pour les touristes sur place. Dans son analyse plus récente, Usui va encore plus loin en affirmant que cette pratique n’est pas uniquement une interaction anodine : l’alimentation devient à la fois un objectif en soi et un moyen de manipuler les comportements des lapins dans l’intérêt des humains.
Elle s’appuie sur le travail de Yi-Fu Tuan, Dominance and Affection: The Making of Pets (1988), qui avance que les humains éprouvent un sentiment de supériorité envers les animaux lorsqu’ils ont le pouvoir de les contraindre ou de les faire supplier. Cette réflexion met en lumière une dimension plus complexe et ambivalente des relations homme-animal sur l’île : ce qui semble être un acte d’affection peut dissimuler des dynamiques de contrôle.
Un autre point soulevé dans l’étude explore comment plusieurs facteurs, tels que l’âge et la culture, influencent les attitudes des humains envers le nourrissage de la faune. Cependant, cette dimension reste partiellement inexplorée en raison des limites de l’échantillonnage : les données recueillies étaient trop restreintes pour approfondir cet aspect.
En guise de conclusion, l’article insiste sur un enjeu crucial : la gestion d’un lieu comme Ōkunoshima relève des compétences et du pouvoir du Ministère de l’Environnement. À l’avenir, deux trajectoires potentielles pourraient émerger concernant la politique de nourrissage :
Deux directions principales sont envisagées pour l’avenir du nourrissage des lapins :
Une interdiction totale Une telle mesure, bien qu’efficace pour réduire les impacts négatifs sur les animaux, risquerait d’avoir un effet dissuasif sur une partie des visiteurs. En effet, l’étude met en évidence une corrélation positive entre le nombre de touristes et la population de lapins : plus l’île attire de visiteurs, plus la population de lapins augmente. Les chercheurs s’appuient sur une étude de Moscardo et Saltzer (2005), qui avait conclu que la possibilité d’interagir étroitement avec les animaux renforçait la satisfaction des touristes. Retirer cette possibilité pourrait donc réduire considérablement l’attrait de l’île.
Un contrôle strict de la distribution de nourriture Une autre option serait de réglementer la manière dont les lapins sont nourris, en instaurant un système supervisé et potentiellement payant. Cela permettrait de limiter les effets délétères d’une alimentation non contrôlée, qui provoque actuellement des déséquilibres majeurs. Le nourrissage aléatoire par les touristes crée des inégalités dans le rythme de consommation des lapins. La plupart des visiteurs se rendent sur l’île pendant les beaux jours ou les week-ends, laissant des « périodes creuses » qui impactent gravement le transit des animaux. Le système digestif des lapins, particulièrement fragile, souffre autant d’une surcharge de nourriture (souvent de mauvaise qualité) que d’un manque prolongé. Ces déséquilibres aggravent les risques de maladies, de mortalité prématurée et de concurrence alimentaire entre individus. Récemment, des mesures timides ont été mises en place. Par exemple, les granulés, jugés néfastes, ne sont plus vendus directement à l’hôtel. Les visiteurs doivent désormais acheter ces paquets en ville, avant de se rendre au port. Une initiative récente, en décembre 2024, illustre bien l’approche ambivalente du gouvernement : le site officiel promet un « petit cadeau » à ceux qui rapportent un sachet de nourriture vide. Ce geste, aussi ironique soit-il, n’a pas pour ambition de garantir le bien-être des lapins. Il reflète plutôt une tentative de régulation, ou même une forme de pari, visant à prolonger leur survie. Une manière, en somme, de les accompagner vers une mort en douceur, orchestrée sous le voile d’une gestion pragmatique.
Afin d’analyser la croissance de l’herbe présente à Rabbit island, une étude menée par l’Institut technique de Kure depuis 2022 est toujours d’actualité. Les chercheurs constatent que les lapins préfèrent ce que nous humains, appelons « mauvaises herbes », telles que les pousses de sedge, un terme anglo-saxon qui désigne une famille de plantes vivaces et herbacées, regroupant plus de 5000 espèces ainsi que les pousses affectées par un type de champignon (smut). En se nourrissant de ces pousses, les lapins contribuent indirectement au maintien des prairies en contrôlant leur croissance, sans nécessiter d’intervention humaine. Les observations sont toujours en cours pour affiner ces résultats.
Ⅴ- Culture locale et situation actuelle
⭢ Margo DeMello, chercheuse en anthrozoologie et spécialiste des interactions entre les animaux non-humains et les humains, expose dans un article intitulé The Rabbit of Ōkunoshima: How Feral Rabbit Alter Space, Create Relationships, and Communicate with People and Each Other (2020) un constat plutôt jovial sur le comportement social des lapins. Il faut imaginer qu’au fur et à mesure des contacts avec les humains, les lapins ont réduit considérablement la prudence qu’ils ont de nature. La culture de ces lapins, transmise entre groupes, donne lieu à des comportements très marqués au fil des années.
Les lagomorphes, au lieu de fuir au moindre pas et de scruter au loin une silhouette apparente, tendent désormais à s’approcher avec une grande amicalité. DeMello parle même de “convivialité agressive”, au point que cette population se montre parfois plus sociable que bon nombre de lapins domestiques. Reculer d’un pas sans faire attention peut blesser des lapins plus fréquemment qu’on ne le pense. Par inadvertance, des touristes marchent sur leurs pattes avant et arrière sans se rendre compte de leur geste. Il en va de même pour les vélos et les scooters. Il faut dire que, comme vu précédemment, le nourrissage incessant quémandé auprès des humains y est pour beaucoup.
À l’origine, Oryctolagus cuniculus est un animal nocturne avec une routine très spécifique. La chercheuse constate que ces habitudes sont bouleversées sur Ōkunoshima : les lapins ont adapté leur comportement pour s’ajuster à la présence humaine diurne, démontrant une résilience et une capacité d’adaptation remarquables. L’Humain est évidemment, par accident, instant de naïveté ou tabou politique, à l’origine du fait qu’une île avec des lapins existe au Japon. Fonder un système économique par le biais du tourisme est une opportunité qui soulève un questionnement moral et éthique sous-jacent. C’est pour cela qu’interroger notre responsabilité en tant que structure politique, touristique ou même simple visiteur est crucial.
Pour autant, il ne faut pas simplement observer cette situation comme une dynamique unilatérale où l’Humain impose et l’animal subit. Les lapins ne sont pas que des victimes ou les résultats d’une équation hasardeuse et malchanceuse. Ils sont aussi des acteurs actifs de leur environnement. Aaron Moe souligne d’ailleurs que les lapins sont des agents capables de créativité, de remise en question et d’organisation, ayant ainsi déterminé leur manière de vivre. Prenez cette perspective : les lapins sont au cœur des mythes d’une région importante et d’une résilience en débat constant. Ils influencent, par leur présence, la vie de nombreux êtres humains sur l’ensemble de la planète. Ils ont survécu, apprivoisé et dépassé leurs peurs les plus instinctives pour construire un système de vie unique et plutôt malin. Fréquenter les abords de l’hôtel est une stratégie délibérée pour eux : un choix tactique visant à maximiser leurs opportunités. Ils forment une communauté imposante, non pas sans conséquence sur la faune et la flore locale. Ils sont bien plus qu’un simple symbole touristique ou un vestige d’un passé tumultueux ; qu’une équation hasardeuse et de malchance ; ils incarnent une intelligence collective et une résilience qui continuent de fasciner.
La frontière entre la vie sauvage et une vie sédentaire se brouille avec ces lapins. La nuit est l’occasion de regagner leurs terriers, souvent aménagés de façon stratégique. Se rapprocher des sentiers fréquentés par les touristes peut être à la fois une bonne et une mauvaise idée. D’un côté, cela facilite l’accès à la nourriture, mais de l’autre, cela augmente les risques, comme celui de se faire écraser par mégarde, que ce soit par un pied humain ou un vélo. Les sentiers de promenade sont ainsi occupés par un grand nombre de lapins, formant ce que l’on pourrait appeler des « socio-zones ». Dans ces zones, la population locale de lapins est bien plus diurne et active en journée que ne le sont les lapins européens dans un environnement sauvage ou même nos compagnons sédentaires à domicile, qui ont pour habitude de vivre davantage au crépuscule. Sur Ōkunoshima, le quotidien des lapins est rythmé par l’arrivée et le départ des ferries et des bateaux.
Cependant, l’ensemble des résidents lagomorphes n’adopte pas les mêmes comportements. Margo DeMello souligne à ce sujet que les lapins vivant sur les côtes du nord, bien moins accessibles aux touristes, affichent des tempéraments bien plus timides et introvertis. Cette diversité de comportements illustre à quel point l’environnement immédiat et les interactions humaines influencent profondément les attitudes de ces animaux.
Dans l’approche qu’a un être humain avec un lapin, une compréhension mutuelle, résultat de cette dépendance multifactorielle, se constate. Grégaires et non vocalisants, les lapins adoptent des comportements très marqués dans leurs interactions. Ils interpellent les touristes afin d’obtenir de quoi grignoter, tout en ignorant le personnel dans son activité routinière. L’article évoque ainsi les lapins comme des participants totalement actifs lors des échanges.
Quelques données chiffrées recueillies à partir de l’article de Dr. Margo Demello :
L’île compterait approximativement 39 colonies distinctes. Ces groupes semblent majoritairement basés sur des liens de parenté, bien que deux colonies observées paraissent être issues d’abandons récents sur l’île. Cela représente une population totale d’environ 1 000 lapins, avec une majorité d’individus âgés de moins de deux ans, ainsi que de nombreuses femelles enceintes.
Cependant, la situation n’est pas aussi idyllique qu’il n’y paraît. Chaque jour, environ 15 lapins meurent, illustrant un cycle de mort prématurée bien plus présent que le cycle naturel de vieillesse. ll semblerait que les corps inertes soient enterrés. Ainsi, c’est un cycle de morts prématurées qui l’emporte sur celui des vies qui s’éteignent naturellement. Ce phénomène récurrent, où la fin des vies animales semble gouvernée par les contraintes imposées par la concurrence et l’accès à la nourriture, est géré discrètement par le personnel de l’hôtel, bien que leur devenir exact reste flou.
Les lapins vivant près de l’hôtel sont souvent les plus vulnérables. Environ la moitié d’entre eux sont malades ou blessés, principalement à cause de la lutte incessante pour la nourriture offerte par les touristes. En ce sens, avoir accès à la nourriture, en se trouvant aux premières loges, devient un véritable privilège. C’est un accès privilégié à des ressources qui ne sont pas partagées également parmi tous les lapins de l’île, créant ainsi des inégalités au sein de cette population. D’un autre côté, l’introversion des lapins vivant sur le nord de l’île, loin des zones touristiques, peut être perçue comme une manière de se protéger de cette rivalité constante. Loin du tumulte, ces lapins ont choisi de s’éloigner des conflits pour survivre, mais ils renoncent ainsi aux avantages offerts par la proximité des visiteurs.
Puisque dans la nature, montrer ses faiblesses peut les mettre en danger, les lapins ont évolué avec une capacité impressionnante à masquer leur difficulté. Il est difficile de détecter des signes de douleur ou d’inconfort uniquement par observation. En réfléchissant à la population de l’île et aux photographies ou vidéos de lapins malades que l’on peut voir sur les réseaux sociaux, il est important de noter que ces cas concernent uniquement les individus dont les pathologies sont clairement visibles et parfois déjà à un stade avancé.
Bien avant leur arrivée, les lapins étaient déjà le résultat d’individus sélectionnés pour la domestication, les rendant à la fois sauvages et non sauvages. Officiellement, l’île reste avant tout classée dans la première catégorie, ce qui signifie que ni le Ministère ni la fondation KYŪKAMURA ne fournissent d’eau potable ni de nourriture. Les lagomorphes évoluent dans un entre-deux, une phase d’adaptation. Cette hybridation de leurs origines comporte des défis complexes et des risques bien réels. Le groupe actuel semble être un élément figé dans le décor, n’appartenant pas véritablement à la nature. Pourtant, vouloir éliminer l’espèce serait non seulement un échec, mais aussi une position éthiquement répréhensible aux yeux de beaucoup. L’idée elle-même est cruelle, et nous ne devrions pas avoir à décider du sort d’individus de cette manière. De plus, se débarrasser des lapins serait pour le moins ironique.
⭢ Deux arguments sont souvent avancés pour justifier cette élimination : (1) Ils seraient nuisibles à l’île. (2) Ils ne sont pas originaires d’ici.
En réponse à ces arguments, il faut rappeler que l’aménagement d’un espace naturel par l’Homme n’est pas nécessairement bénéfique à la biodiversité. Un phare, une piscine ou même une piste de golf ne sont pas non plus des éléments naturels originaux. L’île, en réalité, abrite un « paradis » artificiel.
,Il existe un enjeu sur lequel de nombreux scientifiques se penchent en écologie, celui du déterminisme social des individus au sein de sociétés animales, un phénomène que l’on peut observer dans différentes zones géographiques. Deux exemples clairs d’interactions entre humains et animaux peuvent être trouvés avec les singes crabiers (Macaca fascicularis) à Bali, en Indonésie, et les cerfs sika (Cervus nippon) à Nara, au Japon.
Au Sacred Monkey Forest Sanctuary d’Ubud, les singes crabiers ont appris à exploiter les comportements des visiteurs pour obtenir de la nourriture. Leur interaction est influencée par des règles implicites créées par le tourisme : les touristes apportent des friandises (souvent interdites mais fréquemment ignorées), et les singes, en retour, adoptent des stratégies sociales complexes, comme le vol d’objets personnels tels que des lunettes ou des téléphones. Leur but est de forcer un échange en échangeant de la nourriture contre un objet volé. Le flux constant de touristes façonne ces comportements, par la répétition de ces interactions. Les rôles des singes et des humains sont presque codifiés.
À Nara, les cerfs sika sont considérés comme des messagers divins dans le shintoïsme. Ils déambulent librement dans la ville, et ont intégré des gestes humains dans leur mode de survie : les visiteurs leur offrent des biscuits spécialement vendus sur place, appelés shika senbei. Les cerfs, en réponse, pratiquent un comportement culturel unique : ils inclinent la tête en signe de demande ou de remerciement. Ce comportement, qui n’est pas propre à d’autres cervidés, résulte surtout d’un conditionnement sur plusieurs années, marqué par la cohabitation avec les humains et par des attentes sociales des visiteurs, qui valorisent ces « interactions respectueuses » et amicales.
➡ Dans les deux cas, les animaux ne sont pas simplement influencés par les humains ; ils adoptent et reproduisent des rôles sociaux, façonnés par des règles implicites dictées par les interactions récurrentes avec les humains. Ces exemples illustrent ainsi le déterminisme social dans des environnements anthropisés.
Ōkunoshima, c’est donc cette île que l’on consomme, pour notre détente, la photographie, la proximité avec l’eau, les lapins, la douceur du vent.
Les infrastructures et bâtiments actuellement en service ont été mis à disposition après l’arrivée des lapins. Le personnel hôtelier doit donc répondre aux problématiques liées à cette population, tout en assumant le fait d’en faire un objet commercial et économique d’une importance capitale. Ce qui est observable dans des lieux comme celui-ci, c’est l’apprentissage progressif des comportements sociaux, comportementaux et culturels des touristes par les animaux que l’on vient visiter. Ailleurs dans le monde, des populations de lapins, classées comme nuisibles, ont connu des fins tragiques : empoisonnement, destruction des terriers…
⭢ Donna Haraway, professeur et philosophe née au Colorado, va encore plus loin dans son ouvrage publié en 2008 When Species Meet pour aborder la question de la domestication. Pour elle, il ne s’agit pas d’une domination unilatérale, comme on pourrait l’observer dans le cas des lapins d’Ōkunoshima. Il s’agit plutôt d’une interaction marquée par une coévolution et une négociation permanente. Elle emprunte un concept à Karen Barad pour parler d’intra-action : c’est-à-dire que les deux parties s’influencent mutuellement, façonnant ainsi leur devenir.
Dans le contexte spécifique d’Ōkunoshima, cependant, la limite réside dans la nature même de la relation touristique. Les interactions entre les humains et les lapins sont temporaires et éphémères. Elles se dissipent une fois que le séjour sur l’île touche à sa fin, ne laissant derrière elles que des traces fugaces, sans réelle continuité.
Ⅵ- Interagir avec un animal = un divertissement ?
Ce qui peut être perçu par nous, humains, comme de la gentillesse relève parfois de relations inégales. Nos interactions, bien qu’elles semblent consenties et enthousiastes, découlent, comme à Ōkunoshima, d’une forme de domination. Malgré la bonne volonté de prendre soin des animaux et d’apporter une interaction, le nourrissage et les visites rendent les lapins dépendants. Mais le statut des lapins, en tant qu’espèce introduite, complique largement le processus décisionnel concernant l’avenir de l’île… Le nourrissage offre une expérience ludique plus qu’authentique, et surtout artificielle. Bien que certains humains considèrent ces moments de complicité comme une forme de guérison, cette vision anthropocentrée masque les problèmes sous-jacents, tels que la santé des lagomorphes, mais aussi des questionnements plus philosophiques et éthiques, notamment en ce qui concerne le tourisme animalier.
⭢ C’est là qu’intervient la théorie de la résilience. Il s’agit d’un cadre conceptuel utilisé en sciences pour comprendre comment des systèmes (écologiques, sociaux, économiques…) absorbent et s’adaptent aux changements et aux perturbations, tout en continuant à se développer. Cette approche a été largement développée par l’écologue Crawford Stanley Holling en 1973. Jusqu’alors, les chercheurs pensaient que la gestion des écosystèmes reposait uniquement sur la recherche de la stabilité, insistant sur l’idée que les systèmes écologiques pouvaient exister dans plusieurs états stables. Holling a montré que les perturbations n’étaient pas toujours destructrices et pouvaient, au contraire, offrir des opportunités d’adaptation.
Il devient donc crucial que la question du tourisme sur l’île soit prise en compte par les politiques. Initialement pensée dans un cadre écologique, l’idée de résilience s’applique progressivement à d’autres disciplines, dont le tourisme, en particulier le tourisme animalier, centré sur la faune. Publiée en 2022, l’étude Does the Path toward Resilience Go beyond Conservation at Ōkunoshima Island? re-questionne la gestion traditionnelle de la faune, habituellement fondée sur la conservation, en y intégrant une réflexion sur la résilience et sur l’adaptabilité possible face à cette immense population de lapins, depuis leur introduction sur l’île jusqu’à leur statut d’attraction touristique.
Lorsque l’on parle de capacité d’absorption pour un système de résilience, il est sous-entendu que les changements ne font pas basculer l’objet dans un état totalement différent. Le système résilient qu’est l’île d’Ōkunoshima serait donc en mesure de s’adapter, avec une modification de son fonctionnement. L’application de la théorie de la résilience ici nécessite une sensibilisation à l’éthique animale et aux impacts écologiques. Cette approche pourrait inclure un encadrement nouveau et spécifique, comme la mise en place de sentiers éducatifs, la présence de guides, ainsi qu’une observation à distance, avec moins de proximité envers les lapins.
Décrit comme un “zoo naturel”, ce lieu hybride suscite donc des défis majeurs pour le bien-être des lapins et l’écosystème. En tant que touriste, notre positionnement vis-à-vis des autres espèces animales joue également un rôle crucial. Plus largement, le tourisme animalier connaît malheureusement de très nombreux exemples à travers le monde : delphinariums, promenades à dos d’éléphant, fermes de caresses pour grands félins, cafés à hiboux, à loutres, à hérissons… L’exploitation d’animaux se fait pour le plaisir des humains, au détriment de leur dignité, de leur survie, de leur santé, de leur joie, de leur épanouissement et de leurs projets de vie personnels. Azade Özlem Doğanoğlu et Gülsel ÇİFTCİ, dans un article publié en 2013 sur le tourisme animalier et responsable, Animal Ethics in Tourism, rappellent que les animaux ont le droit de ne pas souffrir, d’être protégés de l’oppression, de l’utilisation et des abus des humains. Les animaux non-humains sont des acteurs significatifs, dont le bien-être est compromis dès qu’il y a une menace de souffrance. Cette souffrance peut être induite aussi bien dans un espace naturel qu’en captivité.
Nous observons des espèces sauvages à des fins récréatives depuis peu dans l’Histoire. Ce phénomène fait suite à l’exploration du “nouveau monde” et aux diverses colonisations européennes durant les XVIIIᵉ et XIXᵉ siècles. Les classes supérieures occidentales ont alors connu une fascination pour l’étrangeté de spécimens, généralement morts, qui pouvaient être récupérés puis rapatriés. S’en est suivie l’apparition des chasses dites safaris sur le continent africain. Les aristocrates et aventuriers fortunés, fascinés par les animaux exotiques, associaient les safaris du XIXᵉ siècle à une conquête et à une accumulation d’items expérientiels à collectionner.
Le XXᵉ siècle a vu naître des exemples précoces de sanctuaires animaliers, tels que le parc de Yellowstone, créé en 1872 aux États-Unis. En 1926, le parc national Kruger, la plus grande réserve animalière d’Afrique du Sud, a vu le jour. Nous pouvons aussi noter la massification des animaux dans des zoos dits modernisés, comme le Zoological Society of London, fondé en 1828. L’essor du transport aérien et l’augmentation du niveau de vie dans les pays industrialisés après la Seconde Guerre mondiale ont facilité l’accès au tourisme animalier. La notion d’écotourisme a émergé dans les années 1990 comme une alternative durable. Au XXIᵉ siècle, certaines attractions deviennent particulièrement controversées, telles que les balades à dos d’éléphant ou les spectacles avec des orques. Les réseaux sociaux, ainsi que les plateformes en ligne de voyages, participent au développement de l’image du voyage et sensibilisent également les voyageurs. En 2020, la pandémie de COVID-19 a intensifié le débat sur les interactions entre les humains et les autres animaux, et notamment sur la durabilité du tourisme animalier (tout en prenant en compte les zoonoses éventuelles).
Ces dernières années, heureusement, les préférences des consommateurs ont évolué. Des organisations comme la WSPA (World Society for the Protection of Animals) ou PETA cherchent à sensibiliser les voyageurs aux impacts de leurs choix. Ce type de campagne influence à la fois les décisions individuelles et collectives. En effet, les voyagistes et les hôtels s’adaptent, et leurs offres évoluent pour répondre aux attentes des touristes, désormais plus soucieux de l’éthique. Les labels et certifications deviennent des atouts commerciaux qui influencent directement les pratiques touristiques, à la fois par des pressions médiatiques populaires et des normes législatives. Si un principe éthique n’est pas respecté, des organisations et associations se tiennent prêtes à interpeller, négocier, ou même appeler au boycott. Autrement dit, elles utilisent plusieurs formes d’action pour créer une synergie autour de normes éthiques plus élevées. Ne pas suivre cette adaptation pourrait entraîner une perte de parts de marché considérables. Il est donc impératif que l’on s’impose.
Alors… Ⅶ- Faut-il boycotter l’île ?
Face à ces constats alarmants, il est essentiel d’envisager des solutions concrètes pour modifier notre perception de Rabbit Island. Faire pression et demander au gouvernement d’agir en faveur du bien-être et de la santé des lapins ne devrait cependant pas se confondre avec un boycott total de la visite de l’île. En effet, cela risquerait de laisser les lapins totalement livrés à eux-mêmes, et leur situation serait alors encore plus précaire qu’actuellement. La nourriture sous forme de granulés, disponible à l’achat sur place, ne répond pas aux besoins essentiels des lapins. Ces derniers, dont les dents poussent en continu, nécessitent impérativement de la verdure. Les granulés, même pour un animal domestique, doivent être évités en raison de leur faible valeur nutritive et de leur taux de graisse et de sucre trop élevés. Leur composition repose souvent sur des céréales et des légumes déshydratés. L’alimentation quotidienne d’un lapin doit être composée d’environ 80 à 90 % d’herbes, de plantes fraîches et de feuillages. Ces éléments apportent des fibres essentielles, ainsi que les vitamines et minéraux nécessaires à leur bonne santé. Les granulés, quant à eux, ne doivent représenter qu’environ 10 à 20 % de leur ration quotidienne. Il serait donc préférable d’adopter une approche plus autonome en apportant soi-même un sac de foin. Cependant, je ne recommande pas d’apporter des légumes verts, car un changement alimentaire trop brusque pourrait perturber le transit des lagomorphes. De plus, un mauvais choix de légumes pourrait entraîner des complications de santé ou aggraver des problèmes existants. La carotte en est un exemple parfait : icône alimentaire du lapin dans l’imaginaire collectif, ce légume est en réalité pourtant bien trop sucré et excessif sur le plan nutritionnel. En laisser sur place attirent les corbeaux ou les sangliers, selon le moment de la journée. Depuis peu, le parc national a décidé d’interdire de nourrir les lapins, et des habitués encouragent également les visiteurs à suivre cette règle. Il existe aussi des protocoles à respecter : nourrir les lapins près d’un terrier constitue une information précieuse pour un corvidé, qui pourra ainsi repérer plus facilement ses proies.
Rappelons-nous aussi que les lapins vivent en moyenne 10 ans.
Cependant, la négligence, les blessures, la prolifération des maladies ainsi que la faim réduisent drastiquement leur espérance de vie. Certains lapins présentent des abcès très impressionnants ainsi que des cancers. L’approvisionnement en eau potable est généralement placé dans des récipients dispersés à travers l’île. Malheureusement, elle y est souvent sale, et parfois, des visiteurs y laissent des légumes flotter. L’article The Dark Side of Rabbit Island souligne également que durant les jours de pluie, mais aussi en hiver, les touristes se font bien plus rares… Et aucune équipe officielle, ni du gouvernement ni de la préfecture, ne vient soigner les lapins, quelle que soit la température. Quelques petites rivières méritent d’être mentionnées : celles de Kunoshima, Okure et la vallée de Kunoshima. La seconde s’est formée à la suite d’un effondrement majeur lors de fortes pluies, au cœur d’une des vallées. Cependant, ces rivières sont limitées et difficilement accessibles pour l’ensemble des lapins. En cas de manque d’eau, les lapins sont contraints de se rassembler dans certains lieux, ce qui peut entraîner des conflits territoriaux. Beaucoup d’entre eux ne savent pas comment survivre face aux éléments naturels, ni se protéger correctement. L’île aux lapins ne connaît pas non plus de la verdure abondante, ni un lieu où poussent des plantes nutritives. Aucune équipe vétérinaire ne vient contrôler la santé des lapins… La situation à Ōkunoshima est un microcosme des problèmes éthiques liés à l’exploitation animale dans le tourisme. Lors d’épisodes pluvieux importants, ou pendant la fermeture des frontières durant la pandémie de Covid-19, les lapins se retrouvent soudainement livrés à eux-mêmes. Les bénévoles, malgré leurs bonnes intentions, ne peuvent assurer la sécurité d’une population aussi nombreuse. La gestion de la pandémie au Japon a été marquée par des mesures strictes, notamment la fermeture des frontières au non-résidents étrangers durant une période prolongée. Les restrictions d’entrée ont été ajustées progressivement, pour être finalement complètement levées le 11 octobre 2022. Durant cette période, le nombre de lapins présents a considérablement diminué. Un recensement effectué en décembre 2021 estimait leur nombre à environ 330 individus.
Cette situation soulève des interrogations profondes sur notre manière de traiter les animaux, souvent réduits à des objets de consommation destinés à satisfaire nos désirs. Une prise de conscience collective, accompagnée d’actions concrètes pour protéger les lapins et instaurer un tourisme responsable, pourrait permettre de faire évoluer la situation.
↪ Voici les moyens d’actions possibles à ce jour afin d’agir / Here are the possible actions to take as of today to make a change :
Transmettre l’information autour de soi, aux potentiels touristes comptant se rendre prochainement au Japon (mais pas seulement)
Contacter le Ministère de l’Environnement du Gouvernement du Japon : Ministry of the Environment, via les réseaux sociaux Twitter(@MOEJ_Climate) et LinkedIn ou par mail : moe@env.go.jp ou plus précisément au bureau régional de l’environnement de Chugoku-Shikoku : REO-CHUSHIKOKU@env.go.jp
Contacter l’entreprise Kyukamura par formulaire de contact ou sur instagram (@kyukamurahotels)
J’aurais voulu vous proposer d’écrire au site officiel de l’île aux lapins, mais le formulaire de contact n’existe plus. -> Rabbit Island
Soutenir le Dōkunoshima Rabbit Medical Fund en mettant en valeur leur compte et leur contenu co-créé par @junkohiking et @her.name.is.mercedes (pseudonymes Instagram) pour pallier la situation.
☝‼︎ [FR] Il est important de noter que formuler vos préoccupations concernant la situation dans votre langue d’origine mettra en évidence l’ampleur internationale de cette problématique, et pourrait faire perdre des clients potentiels. / [ENG] Please note that expressing your concern about the situation in your native language will demonstrate that this issue raises international questions, and that potential customers could be lost.
Si je reçois de nouvelles propositions ou informations, la liste sera mise à jour. / If I receive new proposals or information, the list will be updated.
↪ Ainsi que quelques témoignages sur l’état des lapins à Ōkunoshima / As well as a few testimonies on the state of the rabbits on Ōkunoshima :
Pour conclure, les comportements sociaux des lapins peuvent se résumer à une territorialité centrée autour de l’alimentation et de son approvisionnement quasi constant par les humains. Leurs modes de communication se sont adaptés aux relations sociales humaines, et ces derniers dépendent également des ressources naturelles de l’île, qui sont néanmoins limitées, notamment en raison de l’absence importante de prédateurs naturels.
Dans cette position ambiguë, les lapins sont à la fois des ressources et des objets de divertissement, ne bénéficiant ni de la protection des animaux domestiques, ni de l’étiquette d’animaux sauvages. Cette hiérarchie des espèces, aussi nommée spécisme, illustre aussi comment certains animaux, comme les lapins, sont transformés en symboles d’amusement et de bienveillance. Tandis que d’autres espèces, de poissons, oiseaux et insectes restent exclues, invisibilisés voir ignorés de cette dynamique. Ce résultat amplifie les inégalités dans l’attention que nous leur accordons. L’intérêt porté aux autres animaux varie considérablement, par le manque d’incitation à l’observation ou en termes de protection et de reconnaissance.
Qu’en sera-t-il à l’avenir ? J’espère de tout cœur que Ōkunoshima devienne un futur espace de sensibilisation du public, où la place des animaux dans la société, leur liberté, et le respect inter-espèces seraient au centre des préoccupations. Ce serait l’occasion d’aborder des sujets essentiels tout en menant une réflexion sur la dépendance écologique et l’impact du tourisme sur les écosystèmes fragiles.
• Commentaire personnel :
⭢ Ici, je ne fais que transmettre et partager un constat qui, à mon avis, n’a pas encore été suffisamment mis en lumière, en dehors des sphères des passionnés de lagomorphes.
J’adorerais être incluse dans une étude d’archéologie animale pour observer la façon dont les lapins habitent et utilisent les ruines et aménagements urbains. Je souhaiterais aussi faire de l’observation participante, essayer d’identifier les doyens des groupes tout en appliquant des méthodes ethnographiques. C’est un moment d’écriture rêveur, car le Japon me semble être le bout du monde. 𖦹
Malgré mes recherches dans la littérature scientifique, je n’ai pas encore trouvé d’informations à ce sujet. Au-delà de ces considérations éthiques et écologiques, une autre dimension mérite d’être explorée : la symbolique culturelle et spirituelle associée au lapin au Japon. Cet angle manque dans mon essai, car rien ne m’a indiqué dans mes recherches qu’il s’agissait d’un motif récurrent dans les visites touristiques de Rabbit Island. Cependant, le site promotionnel de l’île mentionne que « les lapins sont souvent considérés comme un symbole d’accouchement sans risque et de bénédiction de nombreux enfants. L’île aux lapins, qui abrite plus de 1 000 lapins, est connue pour être un lieu où l’on peut chercher la bonne fortune pour la fertilité de sa propre famille. » [ENG] L’hypothèse sur laquelle je me penche est la volonté promotionnelle de la symbolique du lapin, qui pourrait être un argument marketing supplémentaire. À ce jour, aucun temple ni sépulture shintoïste n’a été installé sur l’île. Si vous souhaitez vous recueillir ou visiter un lieu spirituel lié à cet animal, plusieurs sanctuaires témoignent de cet attachement spirituel à cet animal : Usagi Jinja (うさぎ神社) à Gifu, Okazaki-jinja (岡崎神社) à Kyoto, ou encore Hakuto Jinja (白兎神社) à Tottori. Et puisque nous en parlions, il y aussi ce sanctuaire dédié au sanglier : Goō-jinja (護王神社) à Kyoto.
…
Rabbit Island, me dites-vous ? Mais laquelle ? Depuis le début de cet article, je vous ai parlé avec précision du passé et de la situation actuelle d’Ōkunoshima. Mais saviez-vous qu’une autre île connaît aussi des résidents permanents lapins, au Japon ?
Il s’agit de l’île de Kayamajima, dont le groupe Churahana, via sa société ‘Kayamashima Tourism Development Co’, est propriétaire. Cette île, qui propose des circuits organisés sous le nom de Kayama Island, accueille également ses habitants à grandes oreilles. Vers 1943, un couple a relâché six lapins sur ces terres, et depuis, leur population a explosé : environ 450 lapins y vivent aujourd’hui. Kazuki Tsunoda, représentant du groupe en charge du développement touristique de l’île, déclarait dans un journal d’Okinawa à propos de Kayamajima « Nous voulons promouvoir cette île comme une île aux lapins. »
Affaire à suivre, donc…
✉︎ Si vous souhaitez me faire un retour, me détailler une information ou me proposer un projet, n’hésitez pas à m’écrire par ici : neptori@protonmail.com
/)/) =( . .)= ( づ♡
• Sources :
Usui, R., Jones, T. E., & Kubo, T. (2024). Travelling to Feed Animals: Identifying Motivations of Tourists on ‘Rabbit Island’, Japan. In Emerging Voices for Animals in Tourism (pp. 5-20). GB: CABI. [EN]
Tuan, Y. F. (1988). Ai to Shihai no Hakubutsu Shi [Dominance and Affection: The Making of Pets]. Kōsakusha. [JAP]
Moscardo, G., & Saltzer, R. (2005). Understanding Tourism Wildlife Interactions: Visitor Market Analysis. Sustainable Tourism Cooperative Research Centre, Gold Coast. [EN]
Usui, R., Wei, X., & Funck, C. (2017). The power of social media in regional tourism development: a case study from Ōkunoshima Island in Hiroshima, Japan. Current Issues in Tourism, 21(18), 2052–2056. https://doi.org/10.1080/13683500.2017.1372393 [EN]
Usui, R. (2022). Does the Path toward Resilience Go beyond Conservation at Ōkunoshima Island? [EN]
Usui, R. (2021). Feral animals as a tourism attraction: characterizing tourists’ experiences with rabbits on Ōkunoshima Island in Hiroshima, Japan. Current Issues in Tourism. DOI: 10.1080/13683500.2021.1978950 [EN]
Tanaka, Y. (1998). Poison Gas: The Story Japan Would Like To Forget. Bulletin of the Atomic Scientists, October, 10-19. [EN]
Doglia, A. (2018). Ōkunoshima and Japan’s Chemical Arsenal: 1900-1945. Acta Asiatica Varsoviensia, (31). [EN]
Jones, T., & Usui, R. (2024). Sustainable Management of Invasive Alien Species in Protected Areas?: The Future Design Dilemma of ‘Rabbit Island’, Japan. In Emerging Voices for Animals in Tourism (pp. 91-104). GB: CABI. https://doi.org/10.1079/9781800621411.0008 [EN]
Fumio, Y. (2020, 11 février). État actuel de la population de lapins à Okunoshima. [JAP]
Fumio, Y. (2020, 11 février). Dossier de présentation du lapin sauvage d’Okunoshima – 4. Bureau régional de l’environnement du ministère de l’Environnement de Chugoku-Shikoku. [PDF] https://chushikoku.env.go.jp/sympo1-1.pdf [JAP]
『毎日新聞』朝刊 (2018, 29 novembre). [JAP]
Hattori, T. (1956). Hiroku Ōkunoshima no Ki. Poison Gas Island History Research Institute. [JAP]
The Beginning of the Gas Plants. Exposition du Musée du Gaz toxique. [JAP]
Fuentes, A., Southern, M., & Suaryana, K. (2005). Monkey forests and human landscapes: Is extensive sympatry sustainable for Homo sapiens and Macaca fascicularis on Bali? In Commensalism and Conflict: The Primate–Human Interface. Norman, OK: American Society of Primatologists. [EN]
Mori, T., & Goto, Y. (2017).Social and behavioral changes in the sacred deer of Nara in response to human feeding behaviors. Ecological Research, 32(2), 347-355. [EN]
Yoshida, K., & Inoue, Y. (2014). Tourism impacts on the sacred deer of Nara: A behavioral study of visitors’ interactions with the animals. Japan Journal of Ecology, 64(3), 275-282. [EN]
[FR] Les photos des lapins sur ma bande dessinée proviennent du compte instagram @her.name.is.mercedes comme la plupart des informations sur l’état des lapins. Je salue également les écrits de @junkohiking donnant des nouvelles et constatant l’état des personnes lapins sur l’île régulièrement. C’est en découvrant cette publication que j’ai compris avec effroi que rien ne changeait ↓
[ENG] The photos of the rabbits on my comic come from the Instagram account @her.name.is.mercedes, as do most of the information about the rabbits’ condition. I also acknowledge the writings of @junkohiking, who regularly provides updates and observes the state of the rabbits on the island. It was by discovering this post that I realized with horror that nothing was changing ↓
⚠︎ Attention, photo de lapin décédé / ⚠︎Warning, photo of dead rabbit